Les Sociétés d'Exercice Libéral (SEL) sont des structures juridiques françaises conçues pour les professionnels libéraux (médecins, avocats, architectes, experts-comptables, etc.), leur permettant d'exercer en société. Ce cadre répond aux besoins spécifiques des professions réglementées en conciliant indépendance professionnelle, éthique et avantages commerciaux (gestion des capitaux, partage des risques).
Une SEL peut adopter plusieurs formes juridiques, chacune offrant des règles spécifiques de gestion et de responsabilité pour les associés :
- SELARL : Société d’Exercice Libéral à Responsabilité Limitée
- SELAS : Société d’Exercice Libéral par Actions Simplifiée
- SELCA : Société d’Exercice Libéral en Commandite par Actions
- SELAFA : Société d’Exercice Libéral à Forme Anonyme
Ces variantes permettent aux associés de choisir une structure adaptée à leur activité et à leurs besoins de gouvernance.
Évolution du régime fiscal des associés de SEL
L'évolution du régime fiscal des associés de Sociétés d'Exercice Libéral (SEL) a permis d’adapter les obligations fiscales et sociales aux particularités des professions libérales exerçant en société. Une distinction importante s’opère aujourd'hui entre la rémunération technique, correspondant aux activités de prestation de services, et la rémunération de mandat social, liée aux fonctions de gestion exercées par les associés.
Imposition sur les bénéfices
Traditionnellement, les revenus des professionnels libéraux étaient soumis à l’impôt sur le revenu (IR) dans la catégorie des Bénéfices Non Commerciaux (BNC). Avec l'intégration d'une Société d'Exercice Libéral (SEL), les associés peuvent désormais choisir le régime de l’impôt sur les sociétés (IS). Ce régime, appliqué aux bénéfices de la société, offre des avantages fiscaux potentiellement intéressants, surtout pour les sociétés à bénéfices élevés.
Les dividendes versés aux associés sont soumis à l'impôt sur le revenu en tant que revenus de capitaux mobiliers (RCM). Ce revenu peut être taxé de deux manières :
- Prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %
- Taux progressif sur option
L'option pour le régime IS permet aux associés de structurer leur fiscalité de manière plus avantageuse pour les profits élevés.
Prélèvements sociaux
L'évolution du régime fiscal des associés de SEL a également un impact sur les prélèvements sociaux. Depuis 2013, les dividendes versés aux associés d'une SELARL (société d'exercice libéral à responsabilité limitée) exerçant dans la société sont soumis aux cotisations sociales si leur montant excède 10 % du capital social, des primes d'émission et des sommes en compte courant d’associé.
En revanche, cette règle ne s’applique pas aux formes de SEL sous statut de SELAS (société d'exercice libéral par actions simplifiées) ou SELAFA (société d'exercice libéral à forme anonyme). Dans ces cas, les dividendes restent soumis aux prélèvements sociaux au taux fixe de 17,2 % (incluant le prélèvement social et la CSG/CRDS), ce qui constitue un avantage pour certains professionnels libéraux.
En optant pour une SELAS ou SELAFA, les associés peuvent réduire l'impact des prélèvements sociaux, une solution souvent préférable pour les libéraux ayant des dividendes élevés.
Charges déductibles
L’organisation sous forme de SEL permet aux associés de déduire certaines charges professionnelles de leur revenu imposable, incluant notamment :
- Les frais de gestion
- Les salaires versés aux collaborateurs
- Les cotisations sociales
- Les charges d’exploitation
La possibilité de déduire ces charges optimise le résultat fiscal de la société, permettant ainsi de réduire l’imposition globale.
Distinction entre rémunération technique et rémunération de mandat social
La rémunération technique correspond aux honoraires que l’associé perçoit pour son activité professionnelle directe, comme les consultations médicales d'un médecin ou les plaidoiries d'un avocat. Cette rémunération est considérée comme un revenu professionnel et est soumise aux cotisations sociales spécifiques des professions libérales.
- Déductibilité fiscale : Elle est déduite du bénéfice imposable de la SEL.
- Imposition pour l’associé : Elle est imposée dans la catégorie des traitements et salaires ou des BNC (Bénéfices Non Commerciaux), selon le statut de la SEL et l'organisation du cabinet.
La rémunération technique est intégrée dans les charges de la SEL, réduisant ainsi son résultat imposable.
Rémunération de mandat social
La rémunération de mandat social est associée aux fonctions de gestion et de direction au sein de la SEL, telles que celles de président, directeur général ou gérant. Elle est soumise aux cotisations sociales spécifiques aux mandataires sociaux. Selon la forme juridique de la SEL (SELARL, SELAS, etc.) et le pourcentage de détention de capital, le mandataire social peut être affilié :
- Au régime général de la sécurité sociale (similaire à un salarié)
- Au régime des travailleurs non-salariés (TNS)
- Déductibilité fiscale : Cette rémunération est également déduite du bénéfice imposable de la SEL.
- Imposition pour le bénéficiaire : Elle est imposée dans la catégorie des traitements et salaires.
La rémunération de mandat social, selon la structure de la SEL et la participation au capital, permet aux associés de choisir entre différents régimes de protection sociale, optimisant ainsi leur couverture et leur fiscalité.
Synthèse des différences
Type de rémunération | Rémunération technique | Rémunération de mandat social |
---|---|---|
Nature | Rémunération pour services professionnels | Rémunération pour fonctions de gestion |
Imposition | Revenu professionnel imposable | Traitements et salaires |
Cotisations sociales | Régime des professions libérales | Régime général ou TNS |
Déduction pour la SEL | Déductible du bénéfice imposable | Déductible du bénéfice imposable |
Avantages et impacts
La possibilité de dissocier la rémunération technique de la rémunération de mandat social offre une flexibilité de gestion des charges et des cotisations pour les associés. Les professionnels peuvent ainsi choisir de percevoir une rémunération répartie entre mandat social et activité professionnelle, en optimisant leur imposition et les charges sociales, selon leur situation personnelle et la forme juridique de la SEL.
Les exceptions à l’imposition en BNC pour les associés de SEL
Les Sociétés d'Exercice Libéral (SEL) ont permis aux professionnels libéraux de structurer leur activité sous forme sociétaire, offrant des possibilités fiscales spécifiques. Pour les associés, des régimes fiscaux variés s'appliquent, et des exceptions existent quant à l'imposition en BNC. Voici les détails concernant ces exceptions, les obligations fiscales des associés, le régime de la déclaration contrôlée (formulaire 2035-SD), et le régime micro-BNC.
Exceptions à l’imposition en BNC pour les associés de SEL
En général, les revenus des professions libérales sont imposés dans la catégorie des Bénéfices Non Commerciaux (BNC). Cependant, dans le cadre des SEL, des exceptions permettent aux associés de ne pas être imposés en BNC dans certains cas :
Sociétés soumises à l'Impôt sur les Sociétés (IS)
Les SEL sont soumises à l'IS, et leurs bénéfices sont imposés au niveau de la société. Par conséquent, les associés ne sont pas personnellement imposés en BNC pour les bénéfices de la société, mais seulement sur leur rémunération ou leurs dividendes perçus.
Les rémunérations des associés dirigeants (gérants ou mandataires sociaux) sont alors imposées dans la catégorie des traitements et salaires et non en BNC.
Dividendes
Les dividendes versés aux associés sont imposés en tant que revenus de capitaux mobiliers (RCM) et non en BNC. Ils bénéficient du prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %, ou peuvent, sur option, être soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu avec un abattement de 40 %.
Rémunérations des mandataires sociaux
Pour les associés exerçant des fonctions de gestion (mandat social), leur rémunération est imposée en traitements et salaires, même si l’associé exerce en tant que professionnel libéral au sein de la SEL. Ces rémunérations sont donc exclues de la catégorie des BNC.
Déclaration fiscale des associés de SEL : obligations et régimes applicables
Les associés de SEL ont des obligations fiscales spécifiques selon la nature de leurs revenus :
Déclaration de la rémunération technique
Les rémunérations perçues pour les activités professionnelles (rémunération technique) doivent être déclarées dans la catégorie des BNC si l’associé est rémunéré pour ses prestations techniques, dans les SEL relevant de l’IR.
Lorsque la SEL est soumise à l’IS, ces rémunérations sont généralement intégrées dans la catégorie des traitements et salaires.
Déclaration de la rémunération de mandat social
La rémunération de mandat social des dirigeants est imposée dans la catégorie des traitements et salaires, sous réserve des règles spécifiques de cotisations sociales selon le statut de la société.
Dividendes et revenus de capitaux mobiliers (RCM)
Les dividendes doivent être déclarés en RCM, et peuvent bénéficier de l’abattement de 40 % ou être soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %.
Régime de la déclaration contrôlée (formulaire 2035-SD)
Le régime de la déclaration contrôlée, via le formulaire 2035-SD, s’applique aux professionnels libéraux soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des BNC. Il est obligatoire pour ceux dont le chiffre d’affaires dépasse le seuil du régime micro-BNC, ou sur option pour ceux qui souhaitent un régime réel de détermination de leurs revenus. Voici les points clés de la déclaration contrôlée :
Obligations comptables
Le régime de la déclaration contrôlée impose de tenir une comptabilité de trésorerie (encaissements et décaissements), avec un bilan simplifié et un compte de résultat.
Les associés doivent déclarer l’ensemble des recettes perçues et des charges engagées, incluant les cotisations sociales, les frais de déplacement, les honoraires de comptabilité, etc.
Formulaire 2035-SD
Le formulaire 2035-SD détaille les recettes, les charges, et les éventuelles immobilisations de l’activité professionnelle libérale.
Les charges et amortissements y sont également déclarés, permettant ainsi une imposition basée sur le bénéfice net de l’activité libérale.
Avantages fiscaux
Le régime de la déclaration contrôlée permet la déduction de toutes les charges professionnelles réelles et l’amortissement des investissements, optimisant ainsi la base imposable.
Régime micro-BNC pour les associés de SEL
Le régime micro-BNC est un régime fiscal simplifié pour les professionnels libéraux aux revenus modestes. Il n’est toutefois applicable qu’aux professionnels dont l’activité relève de la catégorie des BNC. Dans les SEL, ce régime est rarement appliqué, car :
Conditions de chiffre d'affaires
Le régime micro-BNC est accessible uniquement aux professionnels dont les recettes n'excèdent pas le seuil de 77 700 € (pour 2023). Dans les SEL, les revenus individuels des associés sont souvent supérieurs, rendant ce régime inapplicable.
Calcul simplifié du bénéfice imposable
Dans le régime micro-BNC, le bénéfice imposable est calculé forfaitairement, en appliquant un abattement de 34 % sur les recettes déclarées. Ce régime ne permet pas de déduire les charges réelles ni d’amortir les immobilisations.
Les associés exerçant en SEL bénéficient souvent de rémunérations ou de dividendes qui relèvent de l'IS ou des traitements et salaires, de sorte que le micro-BNC n’est pas adapté à ce type de structure.
En résumé, le régime fiscal des associés de SEL est structuré pour offrir des alternatives à l’imposition en BNC, en favorisant l’IS pour les bénéfices de la société, les traitements et salaires pour les dirigeants, et les dividendes en tant que revenus de capitaux mobiliers. Le régime de la déclaration contrôlée (2035-SD) reste le plus commun pour les BNC en société individuelle, tandis que le micro-BNC est rarement utilisé par les associés de SEL, en raison de ses limitations et de sa simplicité qui ne convient pas aux structures de SEL.
Fiscalité des associés de SEL : impacts en matière de TVA et CFE
Les Sociétés d'Exercice Libéral (SEL) et leurs associés sont soumis à des règles fiscales spécifiques, notamment en matière de Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) et de Cotisation Foncière des Entreprises (CFE). Voici un point détaillé sur les implications fiscales pour les associés de SEL dans ces deux domaines.
1. Impacts en matière de TVA pour les associés de SEL
Les règles de TVA appliquées aux Sociétés d'Exercice Libéral (SEL) dépendent de l'activité exercée et de la structure de la société. Selon la nature de la profession libérale, les SEL peuvent être assujetties ou exonérées de TVA.
Assujettissement à la TVA
Activités médicales et paramédicales : Certaines professions libérales comme les médecins, dentistes, et sages-femmes bénéficient d’une exonération de TVA pour leurs actes médicaux à but thérapeutique, conformément à l’article 261 du Code général des impôts (CGI). Les SEL exerçant dans ces domaines ne collectent donc pas de TVA sur leurs prestations de soins.
Autres professions libérales : Les professions libérales non médicales (par exemple : avocats, experts-comptables, architectes) sont généralement assujetties à la TVA. Le taux applicable dépend du type de prestation, mais le taux standard de 20 % est souvent appliqué. La SEL doit alors collecter la TVA sur ses prestations et la reverser à l’État.
Les professions libérales médicales peuvent bénéficier d’une exonération de TVA, ce qui allège les charges administratives liées à la collecte de la TVA.
Déduction de la TVA
Les SEL soumises à la TVA peuvent bénéficier d'une déduction de TVA sur leurs achats professionnels.
- TVA déductible : Les SEL assujetties à la TVA peuvent déduire la TVA sur leurs achats professionnels (frais de bureau, équipements, fournitures) et leurs investissements, réduisant ainsi le montant de TVA dû.
- Limitation de la déduction : Si une SEL exerce des activités exonérées (par exemple, certains soins médicaux) et des activités soumises à la TVA, elle ne peut déduire la TVA que pour la partie de son activité soumise à la TVA, selon un calcul de proportionnalité.
Les SEL mixtes exerçant des activités soumises et exonérées doivent appliquer une proportionnalité pour calculer la TVA déductible.
Régime de TVA applicable
Les SEL peuvent choisir leur régime de TVA en fonction de leur chiffre d’affaires.
- Régime simplifié : Si le chiffre d’affaires de la SEL est inférieur aux seuils du régime simplifié d’imposition (789 000 € pour les activités de vente de biens et 247 000 € pour les prestations de services en 2023), elle peut opter pour le régime simplifié de TVA.
- Régime réel normal : Au-delà de ces seuils, la SEL est soumise au régime réel normal, ce qui implique des obligations de déclaration et de paiement de la TVA de manière mensuelle ou trimestrielle.
Le choix entre le régime simplifié et le régime réel normal dépend du chiffre d’affaires de la SEL et influe directement sur la fréquence des déclarations de TVA.
2. Impacts en matière de Cotisation Foncière des Entreprises (CFE)
La Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) fait partie de la Contribution Économique Territoriale (CET) et s'applique aux entreprises et professions libérales exerçant une activité régulière. Les SEL et leurs associés sont concernés par cette taxe, avec quelques spécificités selon la nature de l'activité.
Assujettissement à la CFE
- Principe de la CFE : Les SEL sont assujetties à la CFE, et celle-ci est due par l’entreprise elle-même, et non par les associés individuellement. Elle est calculée en fonction de la valeur locative des locaux professionnels utilisés par la SEL pour exercer son activité.
- Exonération possible : Certaines activités peuvent être exonérées de la CFE, de façon temporaire ou permanente. Par exemple, les médecins ou certains praticiens exerçant à titre individuel dans des zones géographiques précises (comme les zones de revitalisation rurale) peuvent bénéficier d’exonérations temporaires.
Calcul de la CFE
La base d’imposition de la CFE repose sur la valeur locative des biens immobiliers utilisés par la SEL au 1er janvier de l’année d’imposition. Cette base est multipliée par un taux d’imposition fixé par la commune où la SEL est établie.
- Cotisation minimum : Si la SEL n’a pas de locaux propres ou si sa base imposable est faible, elle reste tout de même soumise à une cotisation minimum de CFE. Le montant de cette cotisation minimum est déterminé par la commune et dépend du chiffre d’affaires de la SEL.
Même en l'absence de locaux propres, les SEL doivent régler une cotisation minimum de CFE, dont le montant varie selon le chiffre d’affaires de l’entreprise.
Déclarations et paiement
Pour une gestion correcte de la CFE, plusieurs déclarations et paiements sont requis.
- Déclaration initiale : Lors de la création d’une SEL, une déclaration initiale (formulaire 1447-C) doit être déposée pour signaler la nouvelle activité.
- Déclaration annuelle : Chaque année, la SEL doit déposer la déclaration 1447-M pour signaler tout changement de situation (agrandissement, déménagement).
- Paiement : La CFE est généralement due chaque année en décembre, avec un acompte potentiel en juin si le montant de la CFE dépasse un certain seuil.
Les dates de déclaration et de paiement de la CFE sont indispensables pour éviter des pénalités ; pensez à prévoir un acompte en juin si le montant de la CFE est élevé.
Récapitulatif des impacts en matière de TVA et CFE
Impôt | Assujettissement | Calcul | Déclaration et paiement |
TVA | Dépend de l’activité (exonération pour soins médicaux) | Taux standard 20 % pour la majorité des activités | Mensuel, trimestriel, ou simplifié selon CA |
CFE | Assujettissement selon la valeur locative des locaux | Taux communal appliqué à la valeur locative | Déclaration initiale, ajustements annuels, paiement en décembre |
En conclusion
Les associés de SEL doivent maîtriser les spécificités fiscales liées à la TVA et à la CFE pour optimiser leur situation :
- TVA : Selon l’activité exercée, les associés peuvent être exonérés (notamment en secteur médical) ou assujettis avec des obligations de déclaration et de versement.
- CFE : Basée sur la valeur locative des locaux professionnels, elle varie selon les communes, avec des exonérations possibles pour certaines activités ou zones géographiques.
La structure SEL permet une optimisation de la fiscalité grâce à des options d'impôt sur les sociétés (IS), de rémunérations variées et de cotisations sociales adaptées aux besoins des professionnels libéraux.
Les SEL constituent un cadre structuré et avantageux, offrant flexibilité fiscale et avantages financiers. Toutefois, cela impose une gestion rigoureuse des obligations fiscales pour optimiser les charges sociales et fiscales. C'est une solution idéale pour les libéraux souhaitant exercer en société, en combinant optimisation fiscale et adaptabilité, tout en nécessitant une stratégie financière soignée.