Abus de bien sociaux : Définition, dénonciation...

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Par Déborha VINDIOLET
Déborha VINDIOLET
Leader comptable chez L'Expert-Comptable.com avec plus de 6 ans d'expérience dans le domaine. Diplômée en DCG et BTS Comptabilité.
L'article en brefL'abus de bien social représente un délit grave dans le monde de l'entreprise, caractérisé par l'utilisation malhonnête des ressources de la société par ses dirigeants, dans un but personnel ou pour favoriser une autre entité. Cela inclut le détournement de biens, l'exploitation abusive du crédit de l'entreprise, ou encore l'utilisation indue de son pouvoir pour des intérêts privés. Qu'il s'agisse de la non-réclamation de dettes ou du détournement de produits, ces actes nuisent directement aux intérêts de la société, illustrant la gravité de cette faute qui va bien au-delà d'une simple mauvaise gestion.

Face à ces agissements, les conséquences juridiques sont sévères, incluant des peines pouvant aller jusqu'à 5 ans d'emprisonnement et 375 000€ d'amende. Seules les sociétés à responsabilité limitée sont concernées, soulignant l'importance de la vigilance pour les actionnaires et associés qui peuvent se porter partie civile en cas de préjudice. La procédure de dénonciation, rigoureusement encadrée, exige une démarche précise auprès du Procureur de la République, accompagnée des preuves du délit. Ce cadre légal strict vise à protéger les entreprises des dérives de leurs dirigeants, tout en offrant un moyen d'action efficace contre les abus.
Sommaire

En utilisant sa société pour soutenir sa candidature à une élection politique, le gérant commet ce qu'on appelle un abus de bien social. Comment définit-on l'abus de bien social ? Quelles sont les conséquences pour le dirigeant ?

 

Qu'est ce l'abus de bien social ? Définition

L'abus de bien social est un délit commis par le dirigeant, qui de mauvaise foi, a fait un usage abusif des biens, du crédit, des pouvoirs ou des voix de la société.

L'usage abusif est caractérisé dès lors que :

  • L'usage est contraire à l'intérêt social. Par exemple un dirigeant qui volontairement ne réclame pas le paiement d'une dette porte atteinte au crédit de la société.
  • L'usage est fait « à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ». La jurisprudence a élargi la notion d'intérêt personnel. Sont pris en compte non seulement les intérêts de type matériel comme par exemple une rémunération excessive mais aussi les intérêts de type moral comme les actes effectués dans le but de satisfaire un ami.

Exemples d'abus de bien sociaux

L’abus de biens sociaux correspond à un usage de biens d’une société réalisé de mauvaise foi par son gérant, un dirigeant, un directeur général, un membre du directoire, un liquidateur amiable et allant dans le sens contraire des intérêts de la société. Par exemple :

Quand un gérant détourne régulièrement des produits réalisés par sa société comme des ordinateurs ou des caisses de vin, gratuitement, alors ce sont deux exemples d’abus de bien social.

Si un dirigeant de société prend aussi régulièrement des produits fabriqués par sa société, sans les payer, c’est aussi du détournement de bien social. Si ce même dirigeant ouvre un découvert sur le compte courant de la société et l’utilise pour son propre compte, on parle encore d’abus de bien social.

À contrario, quand un dirigeant de société fait perdre de l’argent à sa société, car il a conclu de mauvaises affaires, il n’y a pas d’abus de bien social mais uniquement une mauvaise gestion, car il n’a effectué aucune malversation pour son intérêt personnel.

 

La différence entre abus de bien social et abus de confiance

L’abus de biens sociaux est effectif quand un dirigeant de société utilise les biens, le crédit, les voies ou les pouvoirs de la société en toute conscience pour des fins personnelles qu’elles soient directes ou indirectes.

L’abus de biens sociaux est défini à l’article L 241-3 4e du Code de commerce. L’abus de biens sociaux est considéré comme un délit et relève du droit pénal ayant de lourdes conséquences pour le dirigeant de société qui a fait usage des biens de société pour son propre profit ou pour une autre société dans laquelle il a des intérêts.

L’abus de confiance correspond au détournement qu’une personne peut effectuer au profit d’autrui, que ce soient des fonds, du mobilier, des sommes d’argent, un chèque, une carte bancaire, un fichier clientèle, de la marchandise, etc. L’abus de confiance est défini à l’article314-1 du Code pénal.

Il existe quelques similitudes entre l’abus de confiance et l’abus de biens sociaux, mais l’abus de confiance est une infraction intentionnelle pour détourner une chose.

Tandis que l’abus de bien sociaux est un acte à caractère abusif étant contraire à l’intérêt d’un intérêt social commis par le dirigeant d’une société.

L’abus de biens sociaux et l’abus de confiance sont punis de la même manière et les peines encourues peuvent aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 375 000 € d’amende depuis la loi n°2020-1972 du 24 décembre 2020.

 

Qui est concerné par l'abus de bien social ?

L'abus de bien social ne concerne que les sociétés dont la responsabilité des associés est limitée. Ainsi les sociétés en nom collectif ne sont pas concernées par l'abus de bien social. Sont concernées par cette infraction les:

  • SA, SARL
  • SCA
  • Société coopérative, société d'assurance
  • Société civile de placement immobilier
  • Société dont l'objet est la construction
  • Caisse d'épargne

En outre l'abus de bien social peut être commis par le président, les administrateurs ou les directeurs généraux pour une SA, les gérants (personne physique) pour une SARL, les dirigeants et les présidents (personnes physiques ou morales pour les SCA ou toutes personnes qui dirige une société sous le couvert ou au lieu et place de leurs représentants légaux).

 

Qui dénonce l'abus de bien social ?

L'action civile au pénal peut être exercée par :

  • La société victime de l'abus de bien social via son représentant légal. Les dirigeants fautifs devront rembourser les sommes détournées et verser à la société des dommages et intérêts.
  • Les associés à titre personnel : La justification d'un préjudice personnel permet aux associés de se constituer partie civile et de demander réparation.

 

Quelles sont les conséquences d'un abus de bien social ?

Les peines pour l'abus de bien social sont les suivantes :

  • Une amende de 375 000€ et une peine de 5 ans d'emprisonnement
  • Si la société se retrouve en cessation des paiements, ces abus de bien sociaux peuvent alors être qualifiés de banqueroute. des peines complémentaires s'ajoutent telles que la faillite personnelle, l'interdiction de gérer.

 

Les personnes pouvant porter plainte pour un abus de bien social

En cas d’abus de biens sociaux, c’est la société qui est victime qui peut porter plainte. C’est son représentant légal qui porte plainte pour elle afin d’engager la responsabilité du dirigeant qui est le responsable du délit.

Si c’est le dirigeant qui est l’auteur de l’abus de biens sociaux, ce sont les actionnaires ou associés de la société, qui peuvent alors se porter partie civile au nom de la personne morale. Cette action est définie à l’article L225-252 du Code du commerce.

Les éventuels créanciers et le comité d’entreprise n’ont pas le pouvoir de porter plainte en cas d’abus de biens sociaux. Afin de porter plainte pour abus de biens sociaux, le représentant légal de l’entreprise ou ses associés envoient une lettre recommandée au Procureur de la République.

Elle doit être accompagnée des preuves du délit. Avant de déposer plainte, il leur revient de vérifier toutes les pièces comptables de l’entreprise et de reconstituer les opérations pouvant être régulières.

 

Quelle est la procédure de dénonciation d'un abus de bien social ?

Quand un dirigeant d’entreprise, un associé ou un actionnaire pense que le dirigeant d’entreprise est malhonnête et se livre à un abus de biens sociaux, il peut engager une procédure à l’encontre de cette personne.

Pour commencer, il doit reconstituer l’ensemble des opérations irrégulières qu’il a constatées et les examiner en détail (surtout les pièces comptables).

Selon l’article 382 du Code de procédure pénale, le tribunal compétent est alors défini. Il s’agit de celui dont dépend le lieu où le délit a été commis ou le tribunal dont dépend le domicile du dirigeant ayant commis le délit. L’ensemble des pièces comptables doit être envoyé au Procureur de la République en recommandé.

Si le dirigeant est déjà incarcéré, c’est le tribunal compétent du lieu d’incarcération qui doit être saisi. Il faut ensuite porter plainte au Procureur de la République par lettre recommandée avec accusé de réception et conserver la copie de cette plainte.

Si le Procureur de la République donne suite à l’affaire, alors, le plaignant doit se constituer partie civile afin de défendre ses intérêts au pénal.

 

Modèle de lettre à envoyer au Procureur de la République

Nom et prénom

Coordonnées

Adresse du procureur et date

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Objet : plainte pour abus de biens sociaux

 

Monsieur le Procureur de la république,

Je viens porter à votre connaissance les faits suivants dans le cadre de l’abus de biens sociaux. Je suis propriétaire de la société (nom)dont le siège est à (adresse) (rajouter le nombre de parts possédées ou des actions et le nombre de parts totales).

En effet, je faisais confiance à (nom et coordonnées du dirigeant ou gérant ayant commis l’abus de biens sociaux), mais viens de constater les faits suivants me semblant être correspondre à un abus de biens sociaux (indiquer le motif de façon précise). En conséquence, je souhaite déposer plainte contre (nom et coordonnées de la personne) et vous joins à cet effet, les pièces justificatives prouvant l’infraction.

En vous remerciant par avance de l’attention que vous porterez à cette affaire, je vous prie d’agréer, Monsieur le Procureur de la République, l’expression de mes salutations distinguées.

(Signature).

 

Prescription sur les abus de bien sociaux

L’abus de bien sociaux est considéré comme un délit de gravité moyenne et se situe entre la contravention et le crime. À compter de la date des faits, il se prescrit alors au bout de six ans. Au-delà de ces années, Son auteur ne peut plus être poursuivi légalement. Par contre, le point de départ du délai de prescription peut être reporté dans deux cas de figures, qui sont :

  • Quand l’abus de biens sociaux est occulte (qui signifie que les éléments constitutifs ne sont pas connus par la justice et la victime)
  • Quand l’abus de biens sociaux est dissimulé (qui signifie que sont auteur cache tout ce qu’il peut pour que l’abus de biens sociaux ne soit pas découvert)

Dans ces deux cas, il est prévu à l’article 9-1 du Code pénal que le point de départ est alors reporté au jour où l’abus de biens sociaux est constaté.

Dans le même temps, la loi prévoit un délai de 12 ans pour le délit et de 30 ans en matière criminelle. Au-delà, aucune action ne peut être menée à l’encontre de la personne ayant commis ce délit.

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