L’auto-entreprise est-elle encore une entreprise ?
En 2009, lorsque le statut de l’auto-entreprise a été mis au jour, nombreux sont ceux qui y ont vu une solution simplifiée de continuer à exercer leur activité indépendante dans un contexte économique plus que houleux. Cela pouvait concerner les porteurs de projets un peu frileux, mais aussi ceux qui s’étaient déjà lancés dans le milieu de l'entrepreneuriat et qui avaient été échaudés par un échec bien souvent coûteux personnellement et financièrement. Les plafonds de chiffre d’affaires alors autorisés semblaient pouvoir permettre un revenu qui, sans être réellement confortable, se trouvait encore au-dessus de la moyenne des salariés. Mais désormais, avec ces plafonds revus à la baisse, c’est un autre type d’auto-entrepreneur qui va devenir majoritaire dans ce statut : les salariés. Toutefois, cette situation duelle entraîne quelques obligations qu’il est nécessaire de respecter.
Comment ça marche ?
Rien de plus simple. Le salarié qui veut ouvrir son auto-entreprise n’a pas de démarche différente à effectuer de celles qui incombent aux travailleurs non salariés. L’inscription se fait très rapidement en ligne et l’auto-entrepreneur peut commencer à facturer au plus tôt.
Les charges sociales
En tant que salarié, vous êtes affilié au régime général pour la santé, la retraite et le chômage. Mais en tant qu’AE, vous aurez des charges supplémentaires à régler, qui seront calculées sur le chiffre d’affaires réalisé. Ces charges peuvent être versées au mois ou au trimestre. Attention, les charges versées dans le cadre de l’emploi salarié et celles de l’AE sont totalement distinctes et n’interagissent pas entre elles pour donner lieu à quelques exonérations (ni ouvrir droit à un double versement de prestations). Un point important toutefois : le travailleur dépend du régime de son activité principale. L’activité principale est celle qui génère le plus de revenus chaque mois. Donc, si l’activité AE devient plus lucrative que le salaire, la personne dépendra du régime social des indépendants et non plus de la caisse primaire d’assurance maladie. Cette différence est loin d’être anodine, car le régime général est bien plus attrayant que celui des indépendants (indemnité journalière maladie plus faible, seize jours de carence au lieu de trois…). Le salarié AE a donc tout intérêt à maintenir son activité indépendante en deçà de son salaire.
En dehors de ce point, les charges AE étant à payer sur la réalité du CA (et non pas sur un forfait comme pour les autres entrepreneurs), l’indépendant n’aura pas à débourser plus que ce qu’il aura perçu.
Les impôts
Le salarié AE devra être particulièrement vigilant sur son impôt sur le revenu. En effet, si le salaire annuel continue à être déclaré, le contribuable devra ajouter le montant de son CA. Et s’il n’a pas pris l’option libératoire, le coût de l’imposition peut devenir un vrai coup de massue. Il est donc fortement conseillé d’opter pour le prélèvement libératoire (qui augmente le montant de charges à payer mais dédouane de l’impôt par la suite), afin de ne pas passer dans la tranche d’imposition supérieure.
Quand à la taxe foncière des entreprises, elle est due même si l’AE n’a pas de local propre et exerce chez lui. Après l’exonération des trois premières années, l’AE salarié devra s’en acquitter annuellement même si son CA est nul.
Et vis-à-vis de l’employeur ?
L’employeur ne peut pas s’opposer à ce que l’un de ses salariés exerce une activité annexe en tant qu’auto-entrepreneur. D’ailleurs, l’employé n’est tenu de demander aucune autorisation préalable, ni même d’informer sa direction de son lancement en AE. Sauf s’il décide de demander le congé non rémunéré d’une année destiné à développer son activité, avec la faculté légale de récupérer son emploi si l’issue du projet est défavorable.
Dans la pratique, le salarié qui est AE doit aussi respecter quelques règles élémentaires qui ne sont toutefois pas drastiques, et qui pourraient tout aussi bien s’appliquer aux autres gestes de la vie quotidienne. L’employé AE ne peut par exemple pas exercer son activité AE pendant les heures de travail légal de l’entreprise dont il dépend. Il ne peut bien sûr pas non plus utiliser le matériel de la société dans son activité indépendante. L’employeur qui constaterait ce type d’agissements serait en droit et en mesure de faire appliquer des sanctions de travail à son employé. Cela sera particulièrement grave si l’AE se sert de logiciels dont les licences ont été payées par l’entreprise pour générer son revenu complémentaire.
Mais qu’en est-il du cœur de l’activité ? Emploi et AE peuvent-ils être incompatibles ?
Exclusivité et non-concurrence
Pour savoir s’il peut créer une activité AE relativement proche de celle qu’il exerce à son poste de travail, l’employé doit se référer à son contrat de travail. Ce dernier peut comporter une clause d’exclusivité. Cette clause interdit normalement au salarié d’exercer son métier pour le compte d’un autre employeur ou pour son propre compte. Toutefois, cette clause ne peut pas être utilisée par l’employeur durant la première année de création de l’entreprise.
La clause de non-concurrence concerne elle le salarié dont le contrat de travail a pris fin. Elle intéressera l’AE qui vient de rompre son contrat de travail. Cette clause doit comporter une contrepartie financière au bénéfice du salarié pour être recevable en cas de litige.
Intéressant ?
En résumé, le cumul emploi et AE sont intéressants si :
- le salarié n’a pas d’investissement à réaliser pour démarrer son activité.
- le montant du salaire est supérieur au CA (afin de rester soumis au régime général).
- l’option libératoire de l’impôt est choisie.